Lorsque l'été 2022 est arrivé, cela faisait plus de deux ans que de nombreuses personnes chez Globalia travaillaient à distance. J'ai décidé de pousser plus loin en vivant, voyageant et travaillant comme un nomade numérique dans ma petite Honda Fit 2013. C’est une aventure qui a fini par durer quatre mois et s'est étendue sur environ 25 000 kilomètres.
Dans ce qui suit, je vous partage mes principaux enjeux liés au télétravail extrême et les solutions que mon expérience m’a permis de développer.
Je parlerai principalement d’aspects qui ont un lien direct avec le travail, laissant de côté des points généraux comme l'alimentation, l'hygiène, l'habillement, etc. Comme ce voyage n'était pas des vacances et que j'allais continuer à travailler à temps plein, il y avait deux choses importantes à considérer : l'électricité et la connexion Internet.
L'électricité était un élément important auquel il fallait penser, puisque c'était une nécessité qui allait me permettre de travailler huit heures par jour. De plus, l'électricité allait être utilisée pour des activités de tous les jours comme regarder des films, cuisiner et faire bouillir de l'eau pour mon thé.
En recherchant des options électriques, je suis tombé sur des stations d’alimentation portables dans lesquelles il est possible de brancher plusieurs appareils simultanément grâce aux prises USB-A, USB-C et murales. Il existe également plusieurs façons de recharger une station électrique: prise 12 V dans une voiture, prise murale et panneaux solaires. Le coût d’un tel appareil n’est pas donné, mais ça en vaut vraiment la peine puisque ça m’avait permis de travailler et survivre dans les forêts, dans les déserts et sur la plage pendant quatre mois.
J’ai fini par acheter une station électrique de 288 Wh avec des panneaux solaires de 160W. Les jours ensoleillés, cette configuration était plus que suffisante pour subvenir à mes besoins en électricité. Les jours nuageux ou pluvieux, il fallait porter attention à la consommation électrique, mais comme j'étais un nomade numérique, je pouvais facilement conduire vers les zones ensoleillées.
Avoir une bonne connexion Internet est de la plus haute importance pour tout type de développeur Web en raison de la nature du travail. En effet, c’est essentiel pour la communication avec les collègues, mais aussi pour garder contact avec la famille, les amis ainsi que pour les loisirs.
Tout cela nécessite une certaine quantité de bandes passantes qui peut être aléatoire en fonction du nombre d’appels conférences que vous avez, du nombre de films que vous regardez ou de la taille des fichiers que vous transférez. En raison de ce caractère imprévisible, j'ai choisi un service de point d'accès qui fournissait des données illimitées à travers le Canada et les États-Unis. Les vitesses sur le terrain étaient malheureusement plus lentes (moins de 10 Mbps) que ce à quoi je suis habitué au bureau ou à la maison, mais c'était suffisamment rapide pour que la visioconférence avec plusieurs personnes soit possible.
Comme dans tant d'aspects de la vie, nous pouvons toujours préparer et planifier, préparer et planifier, mais il y a toujours des choses inattendues qui se produisent.
La nature est facilement en tête de liste, car c'est l'aspect le moins contrôlable de la vie sur la route. Le climat peut être imprévisible et pour un voyage comme celui-ci, cela affecte directement la quantité d'électricité que je pouvais utiliser par jour. Parfois, quand le ciel était nuageux ou pluvieux pendant plusieurs jours, sur une grande superficie, j'allais travailler dans des cafés. Même les jours ensoleillés avaient leurs défis, car les panneaux solaires ont besoin d’être bien orientés afin de maximiser leurs capacités, j'ai donc passé beaucoup de temps à les déplacer pendant que la Terre tournait.
Un autre défi lié à la nature était les insectes volants tels que les moustiques et les mouches qui étaient omniprésents. Dans le désert, j'ai rencontré des coyotes à l'occasion. Pendant ces moments, je prenais une courte pause du travail pour faire une petite recherche et apprendre à quel point ils représentaient une menace pour les humains. Apparemment, ils laissent généralement les humains tranquilles s'ils ne sont pas dérangés. À une autre occasion, j'ai eu une infestation d'insectes qui m'avait obligé à interrompre complètement le travail pour déménager ailleurs.
Dans l'ensemble, ces rencontres avec des animaux ont ajouté un élément d'imprévisibilité et m'ont forcé à être conscient de mon environnement tout en travaillant et en vivant avec la nature.
Les jours de vents forts et de pluie pouvaient certainement être gênants, juste à cause du bruit. Comme c'était l'été et que je travaillais à l'extérieur, la chaleur était une grande source de distraction. Lorsque c’était le cas, il m'arrivait de diviser ma journée de travail et de faire une grande pause au moment le plus chaud de la journée. C'était une stratégie pour faire face au stress thermique tout en restant productif.
La distraction la plus inattendue était la beauté de la nature. Il y avait des moments où je regardais la plage, les montagnes et le paysage et j'étais simplement émerveillé par la beauté qui m'entourait et je devenais rempli de gratitude de pouvoir faire un tel voyage tout en continuant à travailler. C'était un sentiment profond et lourd que je ne sais pas exprimer correctement avec des mots.
Avec les distances parcourues en auto, je m'attendais à des problèmes de voiture, mais je ne pouvais pas les prévoir précisément. Au cours de ces quatre mois, j'ai eu une crevaison, une bougie qui s'est mystérieusement débranchée, un changement de plaquette de frein et des vis mal serrées.
Ce qui est intéressant concernant les problèmes de voiture sur la route, tout en y vivant, est l'absence de stress de devoir attendre de l’aide sans aucun équipement de survie. Lorsque vous dormez dans votre voiture et que vous avez de la nourriture et de l'électricité, vous pouvez faire n'importe quoi exactement là où vous êtes. Cette pensée a rendu mes pannes d’auto relativement sans stress. J’aurais pensé complètement autrement si c’était arrivé à Montréal avec une auto vide, sans nourriture ni électricité.
La taille de mon bureau était réduite à la taille d’une petite table de camping et un petit tabouret de camping à trois pattes. Il faut mentionner que je n'avais que mon ordinateur portable de 13 pouces sans moniteur externe. C’est habituellement ainsi que je travaille au bureau et à la maison, alors j'étais déjà à l'aise avec ça.
Les différences de fuseau horaire avaient un rôle important en ce qui concerne la collaboration et les réunions. Pendant que j'étais sur la côte ouest, qui est trois heures derrière Montréal, je devais me lever à 5 heures du matin pour des réunions matinales. Durant l'été, je me couchais généralement vers le coucher du soleil, autour de 21h, alors j’avais généralement un bon sommeil.
La pandémie a augmenté le taux de dépression en ce qui concerne le travail à distance en raison de l'isolement social, d'un changement à l'équilibre de vie, etc. Ce sont des problèmes qui peuvent survenir de différentes manières lorsqu’on vit sur la route.
Par exemple, lorsqu'il y avait des événements sociaux comme des barbecues, être loin signifiait que je ne pouvais pas y participer et la décision de partir signifiait m'éloigner de tout le monde et de tout autour de Montréal. L'avantage de vivre à une époque où Internet est accessible partout, même au milieu du désert, c'est qu'il est possible de se connecter avec les gens, même quand on se trouve dans des espaces physiques différents.
Le soutien. Le soutien de tout mon entourage était très encourageant; de la famille, des ami(e)s, des collègues et des étrangers. Personne ne m’a dit de ne pas partir. Personne ne m’a dit que c’était de la folie. Il y a juste eu des gens soucieux pour ma sécurité, mais ça n’atteignait jamais un niveau d’opposition.
J’admets que j’avais un énorme stress de performance lié à la peur d’échouer, d’être incapable de survivre sur la route en travaillant à temps plein. Afin de faire face à cette peur, la communication et la transparence avec l’équipe au travail étaient primordiales pour moi afin de montrer à mes collègues que j’étais bien présent comme si je n’étais pas parti. Toutes les semaines, j’utilisais un de nos outils de communications internes pour rédiger un petit compte-rendu de ma dernière semaine. Il s’est avéré que certains collègues trouvaient que j’étais encore plus performant qu’avant.
Autre chose qui m’a beaucoup aidé est le fait que ce n’était pas le premier voyage dans lequel j’allais dormir seul dans une auto. Ma première fois était pour un voyage de quatre jours à Porto Rico. C’était un voyage sans préparation sauf pour la réservation du véhicule avant d’arriver à destination. La fois suivante était pour des vacances d’une semaine en Gaspésie.
Ces moments m’avaient montré que j’avais l’état d’esprit pour être confortable de dormir dans une auto à des endroits variés.
Tout le monde de tous âges et de tous horizons peut le faire avec les bonnes préparations. J'ai rencontré de jeunes adultes, des retraités et des familles avec de jeunes enfants.
Ce qui rend une telle aventure facile ou difficile sont les circonstances de chaque personne et le type de personne qu’on est. Par exemple, les personnes qui veulent absolument travailler avec plusieurs moniteurs devront repenser leur configuration électrique, car il leur faudra plus d'électricité. Personnellement, je triplerais ou quadruplerais ma capacité électrique si j'ajoutais un deuxième moniteur.
Ce voyage de quatre mois à vivre sur la route aux États-Unis, à camper et à travailler au milieu de nul part, loin de tout et de tout le monde a changé ma vision de la vie et m’a offert la paix et la sérénité. Cette aventure m'a également confirmé que j'avais les capacités, la discipline et le bon employeur pour faire de ce télétravail extrême un succès.
Parmi les choses que je ferais différemment, ce serait une augmentation de ma capacité électrique et un changement vers un véhicule avec plus d’espace. Si des personnes veulent entreprendre quelque chose de similaire, je suggère de commencer petit. Pour débuter, partez pour une fin de semaine ou une semaine. Ensuite, partez pendant un mois. À chaque fois, je conseille d’être flexible pour le moment du retour. Peut-être que vous n’allez pas aimer, alors vous reviendrez seulement après quelques jours. Peut-être que vous allez adorer et vous pouvez étendre votre aventure.
Ce qui est surtout certain pour moi, c’est qu’il y aura une prochaine fois.