L'empathie : nous entendons souvent ce mot lorsqu’il est question des milieux de travail liés aux domaines de la santé, de l’éducation et des ressources humaines. Par contre, on oublie souvent que dans le domaine des technologies et de la communication, l’empathie doit se retrouver au centre du schème de valeurs d’une organisation. Elle doit tout autant devenir intrinsèque à la culture d’entreprise.
Il est important, en premier lieu, de bien comprendre ce qu’est l’empathie au sens littéraire et ce qui en découle. Voici une définition tirée de l’œuvre de Carl Rogers, figure emblématique de la psychologie humaniste nord-américaine.
« Être empathique, c’est percevoir le cadre de référence interne d’autrui aussi précisément que possible et avec les composants émotionnels et les significations qui lui appartiennent comme si l’on était cette personne, mais sans jamais perdre de vue la condition du “comme si" [...] »
Rogers (C), a way of being, Boston 1980, Houghton Mifflin…
De nos jours, énormément d’entreprises de services sont aux prises avec des problèmes liés directement au « clash » générationnel, à la responsabilisation des ressources, ainsi qu’à la rétention de jeunes talents. Confrontés à des systèmes de valeurs qui sont diamétralement opposés ou, du moins, peu compatibles, les gestionnaires d’entreprise se retrouvent devant des problèmes communs aux différentes équipes de travail, mais pour lesquels il est impératif de trouver des solutions adaptées et différentes.
L’empathie joue un rôle clé dans ces situations et il sera parfois difficile de distinguer les individus ayant la faculté d’exprimer de l’empathie de ceux qui en sont incapables. Il ne faut pas oublier que, outre l’émotion en elle-même, la distinction se fera via la capacité d’un individu à l’exprimer ou non. De plus, tenir pour acquis que nos homologues pensent comme nous ou ressentent comme nous est tout à l’opposé du bienfait que l’on recherche.
Prenons par exemple une situation dans laquelle un gestionnaire de produit doit effectuer une livraison client d’ici 3 jours. En plus de s'assurer de la qualité de ce livrable, il doit gérer une ressource affectée à ce livrable qui conçoit très mal que la livraison puisse être effectuée dans ces délais.
En tant que gestionnaire, il sera important d’être sensible et alerte au stress ou à l’anxiété que cette ressource pourrait exprimer :
- Avertissement verbal;
- Signes physiques liés au stress (parler très vite, incapacité à se concentrer, amortissement…);
- Manque de confiance en soi, etc.
Le gestionnaire aura comme rôle de se mettre dans la peau de la ressource et de proposer un dialogue afin de comprendre le contexte de celle-ci. Peu importe les échéanciers initiaux, bon nombre de raisons pourraient être tributaires d’un retard de livraison (mauvaise compréhension du mandat, changement du mandat en cours, fonctionnalités sous-évaluées, contexte personnel difficile, etc.) et il est du devoir du gestionnaire de ne pas utiliser d’autorité malveillante, mais bien de trouver des solutions pour pallier au contexte actuel. L’empathie sera démontrée ici selon la facilité du gestionnaire à comprendre le contexte de son collègue et selon sa façon de lui proposer des solutions uniques, adaptées à sa personne.
En tant que ressource et main d’œuvre sur un projet, un employé facilitera énormément le travail de ses collègues s’il possède des notions d’empathie lui permettant de comprendre les impacts de son travail sur ceux-ci. Dans la situation notée ci-haut, il est du devoir de cette ressource d’avertir le plus tôt possible le gestionnaire des enjeux liés au projet. Un employé qui aspire au succès de son entreprise comprendra rapidement que le contexte dans lequel le gestionnaire pourrait être coincé si un retard était occasionné est, premièrement stressant et compromettant pour l’employé et, deuxièmement, tout aussi problématique pour la réputation de l’organisation.
Directement liée à l’empathie, la responsabilité découlera d’elle-même; ce concept qui permet à des employés de projeter l’impact de leurs actions sur une longue période de temps. Le principe de responsabilité ne peut toutefois pas émerger sans ce sentiment de compréhension mutuelle. Selon les valeurs de chaque élément d’une entreprise ainsi que celles réellement transmises par l’organisation, l’empathie et la responsabilité s’exprimeront de façons distinctes et spécifiques au milieu.
Les bénéfices de l’empathie en milieu de travail se dessinent souvent comme le début d’un cycle vertueux. La direction de l’organisation étant à l’écoute et respectant l’identité singulière de chacun de ses employés, ceux-ci n’auront d’autres choix que de se sentir importants et déterminants dans la mission de l’entreprise. Bien évidemment, de telles appropriations des objectifs de l’entreprise par les équipes ne peuvent que donner des résultats positifs sur la productivité ainsi que la qualité du travail. De plus, un employé investi d’une mission sera beaucoup plus responsable vis-à-vis son travail que celui qui perçoit l’organisation comme une occupation rémunérée totalisant 40 heures par semaine.
Voici quelques pistes afin de travailler de stimuler l’empathie en milieu de travail :
- Switch Days (permettre aux employés de découvrir un poste autre que le sien le temps d’une journée);
- Utiliser un logiciel de « peer rewarding » qui permet de lire des messages confidentiels que les employés publient dans le but d’exprimer une émotion positive ou négative ainsi que d’encourager/féliciter ses collègues;
- Déterminer avec les employés l’impact unique qu’ils veulent avoir sur l’organisation et leur demander comment l’organisation pourrait avoir des impacts positifs sur leurs vies personnelles;
- Valoriser les processus de dialogue verbal. Encourager les employés à discuter clairement de leurs attentes les uns envers les autres dans un contexte privé et respectueux;
- Créer des activités où les employés seront amenés à parler d’un de leurs pairs.